Andrianampoinimerina renforce la protection du Rova


«Le rôle d’Andrianampoini­merina est capital dans la transformation du milieu merina, au même titre que celui de Radama. Mais quand le premier agissait dans un cadre étroit et fermé, sans moyens techniques et sans références, différents de ceux de ses prédécesseurs, le second lançait des entreprises appuyées par de puissants moyens par rapport à son père », écrit Vincent Belrose-Huyghues dans Un exemple de syncrétisme esthétique au XIXe siècle, le Rova d’Antananarivo (Revue historique Hier et Aujourd’hui, 1975). Selon l’auteur, le problème est de savoir si l’ouverture du monde merina transforme profondément l’ordre des choses à Antananarivo. « Il m’a semblé que la comparaison des réalisations au Rova de Radama et d’Andria­nampoinimerina pouvait apporter un éclairage nouveau sur l’interaction des moyens techniques et des contraintes du milieu concerné. » Dès la prise d’Antananarivo et son installation au Rova en 1794, Andrianampoinimerina procède à des aménagements. Il renforce la palissade de ses prédécesseurs en procédant comme pour les fossés des villages-forts. A. Mille apporte cependant une précision : à l’époque d’Andrianjaka, le Rova possède déjà une enceinte. « Généralement, le sommet ou le tertre sommital subit un nivellement ou aplanissement dont les dimensions dépassent 20 mètres de côté pour la plupart des sites. Le Rova peut prendre la forme de l’esplanade comme à Ambohidratrimo, mais il est souvent rectangulaire. Il est presque partout surélevé et se présente avec un soutènement de pierres sèches. » Poursuivant son explication, Vincent Belrose-Huyghues indique que la terre prélevée à l’intérieur et à l’extérieur pour constituer un fossé, est rejetée pour former un talus. Sur celui-ci, sont plantés de gros pieux taillés en pointe. Des traverses solidement ligaturées assurent la tenue de l’ensemble. Enfin, la terre du talus est tassée. À l’extérieur, des moellons sont ennoyés dans la terre et des épineux (raketa, voatsilo) plantés dessus. « Ces plantes devaient à la fois protéger le talus de l’érosion par les eaux et tenir à distance d’éventuels agresseurs. » Cette palissade demeure ainsi jusqu’aux transformations de Ranavalona Ire vers 1830. Lorsque la palissade est achevée, Andrianampoinimerina fait construire des cases faites de madriers. D’après Alfred Grandidier (Ethnographie de Madagascar, 1908), « au temps d’Andrianam­poinimerina, à la fin du XVIIIe siècle, le Rova (…) contenait 23 maisons ou plutôt cases en bois, ainsi que les tombeaux royaux (…) et deux parcs à bœufs ». Il affirme qu’une case, « Manampisoa existait déjà, mais cela ne fait que 20 maisons ! Je n’ai pu découvrir les trois autres ! » Vincent Belrose-Huyghues indique que la plus ancienne description des cases du Rova date de 1816. « Toutes les maisons sont construites en bois et bordés en petites trinques. Elles ne sont tenues en terre que par les quatre poteaux corniers qui sont très forts (sic) et les trois fourches de faîtage qui les tiennent en terre qui est fort dure, et ils n’ont pour toutes ouvertures que porte haute et très étroite ainsi qu’une fenêtre du même côté, de sorte qu’elles sont très sombres. Elles sont couvertes en joncs et fort élevées » (Journal de Chardenoux). L’auteur ajoute que seuls les éléments indiqués par ce dernier, poteaux, faîtage, encadrements, portes et fenêtres, sont en bois massif (hazomena, merana, ambora et varongitsimivitrana). Les cloisons sont faites d’un lattis de bambous fendues en long, maintenu serré par les traverses du même matériau, le tout fixé aux poteaux corniers et à quelques poteaux de cloisons et ligaturé avec la fibre du hafotra qui sont appelés par Chardenoux « des petites trinques ». D’après l’auteur, cette description correspond à la demeure commune intra-muros de 1800, et à l’habitation générale de 1816. Il fait remarquer que toutes les descriptions données par Jully, Grandidier, Decary et Mantaux qui font de la case en madriers (tranokotona) le type commun de l’habitation merina au XVIIIe siècle, sont des extrapolations à partir de deux cases, Besakana et Mahitsielafanjaka. À l’époque d’Andrianampoinimerina et jusqu’à celle de Ranavalona Ire, la majorité des cases est cloisonnée en bambous dans les villes et en terre battue dans la campagne. L’historien Rahaniraka, frère jumeau de Raombana, « décrit dans sa propriété d’Anosy, la transformation de la vieille demeure en bambou (trano-rindrina) en demeure de bois (tranokotona) dans les années 1830 ». C’est sous Andrianam­poinimerina que s’opère une mutation de ce type au niveau du Rova. On le voit dans les Tantara ny Andriana (Toma II) : « Il forma des charpentiers et désigna des chefs pour les commander… » Et Jully conclut : « À la mort d’Andrianampoinimerina l’art de la construction indigène était en pleine voie de développement. »
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