Gallieni, l’homme qui crée la colonie de Madagascar


Dans son Histoire de Madagascar , Edouard Ralai­mihoatra évoque plusieurs aspects de la personnalité du général Joseph Gallieni. « Le contact des réalités entraina Gallieni au-delà de la stricte exécution de sa mission. Créer une colonie, c’était pour lui faire du neuf, découvrir des virtualités pour les transformer en actes. Si peu homme de bureau, il donnait ses instructions sur le terrain comme au cours de ses voyages autour de l’ile, en 1897, 1898 et 1901. Son imagination féconde s’emparait d’une grande idée ou d’un petit fait pour les concrétiser, pour les amplifier. Il conçut le chemin de fer Tananarive-Tamatave comme devant être le chemin de fer du riz. Il lui fallait un guide de l’immigrant, une exposition des produits malgaches à Paris, à Marseille, une Académie malgache en vue d’une meilleure connaissance de l’ile. Son action était marquée au coin d’un esprit universel, d’un chef qui sut faire partager à ses collaborateurs la passion qu’il portait à son œuvre… » Établi par le premier gouverneur général Joseph Gallieni, au fur et à mesure de la conquête, l’Administration de Madagascar révèle « les mêmes soucis d’efficacité, de profit et d’économie » que sous Rainilaiarivony, estiment certains historiens. Ils se traduisent d’abord par les problèmes de l’Administration proprement dite, car l’importance des besoins résulte de l’occupation de tout le territoire de l’ile. Selon les ethnologues, « la diversité des ethnies, de leurs coutumes, les difficultés nées de l’occupation récente et mal supportée, l’installation des colons nouveaux venus, autant de problèmes difficiles à résoudre. Et l’Administration manque de cadres et de moyens». Dans ces conditions difficiles de l’Administration générale, l’organisation pose, ensuite, les bases de la future organisation civile. « Les directives données aux officiers lors de la conquête, faisaient d’eux des administrateurs auxquels on demandait de construire ou de reconstruire. » Ainsi, la diversité des ethnies pousse le général Gallieni à « organiser l’Administration sur les structures traditionnelles de la population ». Les clans, les fokonolona en Imerina, sont réunis dans le cadre restreint du canton. Le secteur militaire, localisé sur le territoire d’une ethnie par les autorités d’occupation pendant la conquête, devient le district civil dont le chef itinérant est un fonctionnaire français. Les cercles militaires deviennent des provinces (autres que les provinces administratives) dirigées elles aussi par un Français. L’autorité des fonctionnaires français s’exerce, de ce fait, aux échelons supérieurs, cependant que des fonctionnaires malgaches assurent, sous leur direction et sous leur contrôle, la marche des affaires courantes. Parallèlement, l’Administration procède à la promotion des cadres malgaches. Ce système, qui fait un large appel aux fonctionnaires malgaches est, pour l’essentiel, un système d’administration indirecte. Il implique un recrutement important de cadres autochtones. L’enseignement primaire est développé dans la Grande ile en vue de la formation de ces cadres. Dans le domaine de l’enseignement primaire, la pénurie des instituteurs oblige Gallieni, voltairien et anticlérical, à utiliser au maximum les missions qui jouent un rôle considérable dans le développement de l’instruction. « Son réalisme le pousse à accueillir de nouveaux missionnaires français, protestants et catholiques, tout en adoptant en matière de religion une neutralité calculée. » Le gouverneur général prépare, par la fondation des Écoles régionales d’Antananarivo, de Mahanoro et d’Analalava, « le droit d’un enseignement laïc qu’il souhaite développer dans toute l’ile ». Il assigne alors aux maitres des dispositions pédagogiques bien précises : enseignement pratique (technique et professionnel), destiné à former « essentiellement » des paysans et des artisans habiles, des fonctionnaires subalternes et des médecins. En 1905, 230 000 enfants malgaches sont scolarisés, dont seul le dixième fréquente les écoles publiques. La fondation de l’École de médecine, en 1897, est destinée à créer des médecins et des sages-femmes malgaches pour mener à bien l’œuvre médicale et hospitalière. L’Assistance médicale indigène ou AMI s’organise dans les provinces sous la direction des médecins militaires. La lutte contre les endémies, contre la peste, contre la variole, est menée avec une grande vigueur. «Ainsi, la colonie prend à sa charge l’essentiel de l’œuvre de santé ». Mais l’état sanitaire peu satisfaisant pose dans ce domaine, aux Malgaches comme aux Européens, des problèmes considérables. Photo : Archives personnelles
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