La maison de force d'Antanimora a reçu un panier à salade pour transporter les détenus au tribunal et les ramener à la «maison». Fini donc le transport en taxi-be, en taxi ou à pied des prisonniers dont certains profitent pour se faire la belle en cours de route. Un cadeau du Président pour étouffer la grève des agents pénitentiaires qui avaient réclamé un ministre à eux, à l'instar des militaires, des policiers et des gendarmes. Le directeur de la prison a chaleureusement remercié le Président pour ce geste précieux qui facilite son travail et réduit les risques d'évasion. Quand on sait qu'il gère un établissement surpeuplé de trois mille détenus, dont certains attendent toujours d'être jugés après vingt ans de détention, et cela pour une capacité de huit cents personnes, et qu'il doit trouver des places pour vingt nouvelles recrues par jour, on peut comprendre son soulagement. La situation carcérale est dramatique depuis des années mais ni les sonnettes d'alarme des organismes nationaux de protection des droits humains, ni les tirages d'oreille effectués par la communauté internationale à travers les diverses chancelleries, n'ont rien pu changer. Les régimes successifs depuis 1975 n'en ont jamais fait une préoccupation, encore moins une priorité. Et on en est à cette situation où tout dépend de l'aumonhery présidentielle, même pour des choses élémentaires qui doivent se faire sans qu’on ait besoin de les inscrire dans un projet de société. Et le Président en profite pour soigner son image et se poser comme la providence. L'achat de fourgons pour le transport des détenus pour toutes les prisons devrait figurer dans le budget du ministère de la Justice. Aussi curieux que cela puisse paraître, aucun ministre jusqu'à maintenant n'y a pensé. Pourtant à chaque changement de gouvernement, tout le staff d'un ministère s'empresse d'acquérir des 4X4 luxueux. C’est devenu un faux problème qui nécessite l'intervention du Président, trop heureux de cette opportunité inouïe. Il est l'homme à tout faire pour sauver le pays, sans lui, rien ne peut se faire. Une aubaine pour le culte de la personnalité caractéristique d'une république hors du temps. La construction de nouvelles prisons, l'amélioration des conditions des détenus sont des impératifs qui, en principe, devraient figurer en bonne place dans la politique gouvernementale. Mais le dilemme est que, si l'État a les moyens, qui devra-t-il privilégier, ceux qui sont dedans ou ceux qui sont dehors. Pourquoi se soucier des criminels et des délinquants alors qu'on a du mal à satisfaire les gens justes. Si on avait les moyens, on construirait plutôt des logements sociaux modestes que des prisons de luxe. C'est certainement le raisonnement cynique mais justifié des autorités qui se sont succédé au pouvoir. Et on en est toujours à des prisons sans murs dans certaines localités où on s'en remet à la sagesse des prisonniers, en liberté provisoire par la force de la pauvreté. Après tout, les prisons devraient passer après les hôpitaux et les sapeurs-pompiers en termes de priorité, si elle existait. Les premiers fonctionnent sans ambulance alors que les seconds existent grâce à l'assistanat international. Trois entités totalement négligées pour des besoins fondamentaux et pas coûteux qui illustrent le manque de vision, de projet et le peu de souci pour l'intérêt de la population. Mais qu'on le veuille ou non, l'État devra songer sérieusement à bâtir de nouvelles prisons, quitte à sacrifier d'autres blocs miniers pour les Chinois. Avec le nouveau code de la communication, le directeur d'Antanimora aura davantage de souci. De vingt aujourd'hui, ses nouvelles recrues pourraient passer à cent par jour avec le nombre de journalistes ou de simples citoyens qui risquent de prendre le chemin d'Antanimora. Et au lieu d'un fourgon, il faudra un wagon pour ramener les bagnards. Cela aussi s'appelle une vision. Une nouvelle loi s'accompagne bien de mesures d'accompagnement. Par Sylvain Ranjalahy
La maison de force d'Antanimora a reçu un panier à salade pour transporter les détenus au tribunal et les ramener à la «maison». Fini donc le transport en taxi-be, en taxi ou à pied des prisonniers dont certains profitent pour se faire la belle en cours de route. Un cadeau du Président pour étouffer la grève des agents pénitentiaires qui avaient réclamé un ministre à eux, à l'instar des militaires, des policiers et des gendarmes. Le directeur de la prison a chaleureusement remercié le Président pour ce geste précieux qui facilite son travail et réduit les risques d'évasion. Quand on sait qu'il gère un établissement surpeuplé de trois mille détenus, dont certains attendent toujours d'être jugés après vingt ans de détention, et cela pour une capacité de huit cents personnes, et qu'il doit trouver des places pour vingt nouvelles recrues par jour, on peut comprendre son soulagement. La situation carcérale est dramatique depuis des années mais ni les sonnettes d'alarme des organismes nationaux de protection des droits humains, ni les tirages d'oreille effectués par la communauté internationale à travers les diverses chancelleries, n'ont rien pu changer. Les régimes successifs depuis 1975 n'en ont jamais fait une préoccupation, encore moins une priorité. Et on en est à cette situation où tout dépend de l'aumonhery présidentielle, même pour des choses élémentaires qui doivent se faire sans qu’on ait besoin de les inscrire dans un projet de société. Et le Président en profite pour soigner son image et se poser comme la providence. L'achat de fourgons pour le transport des détenus pour toutes les prisons devrait figurer dans le budget du ministère de la Justice. Aussi curieux que cela puisse paraître, aucun ministre jusqu'à maintenant n'y a pensé. Pourtant à chaque changement de gouvernement, tout le staff d'un ministère s'empresse d'acquérir des 4X4 luxueux. C’est devenu un faux problème qui nécessite l'intervention du Président, trop heureux de cette opportunité inouïe. Il est l'homme à tout faire pour sauver le pays, sans lui, rien ne peut se faire. Une aubaine pour le culte de la personnalité caractéristique d'une république hors du temps. La construction de nouvelles prisons, l'amélioration des conditions des détenus sont des impératifs qui, en principe, devraient figurer en bonne place dans la politique gouvernementale. Mais le dilemme est que, si l'État a les moyens, qui devra-t-il privilégier, ceux qui sont dedans ou ceux qui sont dehors. Pourquoi se soucier des criminels et des délinquants alors qu'on a du mal à satisfaire les gens justes. Si on avait les moyens, on construirait plutôt des logements sociaux modestes que des prisons de luxe. C'est certainement le raisonnement cynique mais justifié des autorités qui se sont succédé au pouvoir. Et on en est toujours à des prisons sans murs dans certaines localités où on s'en remet à la sagesse des prisonniers, en liberté provisoire par la force de la pauvreté. Après tout, les prisons devraient passer après les hôpitaux et les sapeurs-pompiers en termes de priorité, si elle existait. Les premiers fonctionnent sans ambulance alors que les seconds existent grâce à l'assistanat international. Trois entités totalement négligées pour des besoins fondamentaux et pas coûteux qui illustrent le manque de vision, de projet et le peu de souci pour l'intérêt de la population. Mais qu'on le veuille ou non, l'État devra songer sérieusement à bâtir de nouvelles prisons, quitte à sacrifier d'autres blocs miniers pour les Chinois. Avec le nouveau code de la communication, le directeur d'Antanimora aura davantage de souci. De vingt aujourd'hui, ses nouvelles recrues pourraient passer à cent par jour avec le nombre de journalistes ou de simples citoyens qui risquent de prendre le chemin d'Antanimora. Et au lieu d'un fourgon, il faudra un wagon pour ramener les bagnards. Cela aussi s'appelle une vision. Une nouvelle loi s'accompagne bien de mesures d'accompagnement. Par Sylvain Ranjalahy