S.O.S. Lémuriens, S.O.S. Nature


Ce 29 avril 2020, les chercheurs de Denver Museum of Nature and Science annonçaient la découverte à Madagascar du fossile d’un mammifère herbivore contemporain des dinosaures, il y a 66 millions d’années et auquel les paléontologues ont donné le nom d’Adala-therium, «Crazy Beast», «la bête folle», dans leur incapacité à le classer dans une catégorie connue : blaireau, castor, paresseux, fourmilliers, tatous... Il serait le fruit d’une «grande expérience évolutive propre», une insularité caractéristique de Madagascar. Un autre mammifère, rendu célèbre par le Dessin-animé «Kungfu Panda», est tout aussi tellement inclassable qu’on a inventé une famille, celle des Ailuridés, dont il est le seul représentant. C’est le panda roux dont il n’existe plus que 10.000 représentants dans la nature, sa population ayant diminué de 40% au cours des 50 dernières années, rien qu’en Chine. Depuis 2015, le panda roux figure sur la Liste des espèces en danger de l’UICN (Union internationale pour la Conservation de la Nature). En cause, la perte et la fragmentation de son habitat ainsi que la réduction de sa nourriture, du fait des activités humaines de plus en plus invasives. À Madagascar, les mêmes causes humaines produisent les mêmes catastrophes animalières, cette fois sur les lémuriens. Cette même année 2015, où le panda roux rejoignait la liste des espèces en danger, le quatrième appel à proposition du programme S.O.S. «Save Our Species», était dédié à la protection des lémuriens de Madagascar. En juillet 2011, Andriaholinirina N. & al annonçaient que la population de Lepilemur septentrionalis a vu son effectif décliner de 80% sur les 21 dernières années avec l’hypothèse pessimiste d’une égale diminution pour les trois générations, sur les 21 prochaines années. 50 représentants de l’espèce étaient encore en vie sur un territoire de désormais moins de 10 km2, au Nord de la rivière Irodo, près des villages de Madirobe et Ankarongana dans la région de Safahary, presqu’à l’extrême Nord-est de Madagascar. Selon la Liste rouge de l’UICN, plus de 90% des espèces de lémuriens sont en danger d’extinction en raison de la destruction de leur habitat causé par l’agriculture sur brûlis, l’exploitation illégale des forêts et la chasse. L’effet combiné de ces pressions a fait des lémuriens le groupe de mammifères le plus menacé de la planète : 9 espèces sur 10 en voie de disparition. S.O.S., «Save Our Species», «Sauvons nOs Espèces» : le 22 mai 2019, dans neuf boutiques Lacoste et sur lacoste.com, 3.520 polos Lacoste, correspondant au total des individus rescapés de 10 espèces menacées, étaient mis en vente. Geste fort, le partenariat #LacosteSaveOurSpecies a fait remplacer le célèbre crocodile par l’effigie brodée de chacun des dix animaux menacés : le phoque moine d’Hawaï (boutique online), le hibou de Mohéli (boutique de Séoul), la baleine noire de l’Atlantique Nord (New York), le lynx ibérique (Paris), la chauve-souris yéménite (Londres), le wombat d’Australie (Tokyo), l’amphibien poulet de montagne (Miami), la libellule de Cebu (Shanghai), l’addax du Tchad et du Niger (Berlin), le poission Goodeid opal (Los Angeles). «Les lémuriens sont à Madagascar ce que les pandas sont à la Chine», aime-t-on dire. Ni les lémuriens ni les pandas ne le savent. Les humains qui déciment leur habitat ou les pourchassent semblent s’en moquer. Disparu il y a 45 millions d’années, au moins l’Adalatherium n’avait pas été victime des humains. Un jour, les lémuriens, le panda géant et le panda roux, ne seraient plus, au mieux que des prisonniers en zoo, au pire des peluches en boutiques de souvenirs. Pour la bonne conscience humaine, on en ferait des avatars humains et leur donner la parole. Une parole très philosophique, une sagesse qui invite à réfléchir, comme chez Maître Oogway, vénérable et sage Tortue, personnage de DreamWorks : «Hier, c’est de l’histoire ; Demain, c’est le futur ; Aujourd’hui est un cadeau : c’est pourquoi on l’appelle Présent». DATAS :

1948 (5 octobre) : création de l’UICN, première union environ­nementale à l’échelle mondiale

1964 : l’UICN met en place la Liste rouge des espèces protégées

2012 : l’UICN inscrit 24 espèces de lémuriens en «Danger critique» ; lancement du programme S.O.S. (Save Our Species)

2013 : Plan d’action pour les lémuriens

2018 (1er juillet) L’UICN annonce que les lémuriens sont désormais les primates le plus menacés sur Terre, avec 95% de leur population sur le point de s’éteindre : sur 111 espèces et sous-espèces de lémuriens, 105 sont menacés d’extinction. 38 espèces de lémuriens en «Danger critique», 44 espèces «En danger», 23 espèces «Vulnérable».

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