Océan Indien - Tourisme : la difficile synergie


L’activité touristique du Sud-ouest de l’océan Indien ne représente que le millième du tourisme mondial. Une question s’est toujours posée aux îles de cette zone : pourquoi ne pas parler d’une seule voix en misant sur les atouts de chacune, et leur complémentarité ? Une réponse a été la création du concept d’Îles Vanille, avec l’ambition de créer un produit océan Indien comme existe sous d’autres latitudes un produit Antilles. Attractivité, accessibilité, visibilité, tels sont les critères majeurs pouvant garantir une offre commune cohérente et compétitive, et une présence remarquée dans les brochures des plus grands tour-opérateurs mondiaux. Les îles ont tous les atouts requis, la deuxième édition de l’International Tourism Fair d’Antananarivo de 2013 a, d’ailleurs, décidé d’être une tribune pour l’intégration régionale et la mutualisation des offres. L’enjeu du concept, concrétisé en 2011 sous la dénomination de Vanilla Island Organisation (VIO), est donc la promotion de la destination régionale. Les conclusions des études préparatoires ont été présentées en juin 2010 au Conseil de la Commission de l’océan Indien (COI). En termes de stratégie, il s’agit notamment de vendre la région comme une même destination, de promouvoir une image solidaire mais riche d’une exceptionnelle diversité, de mettre en commun les moyens tout en renforçant le travail en partenariat et, surtout, d’intégrer le transport aérien en tant que passerelle incontournable entre les îles. Les objectifs, pour leur part, s’articulent autour de certains points forts, dont trois principaux : la redynamisation du tourisme de la zone en fonction de la demande internationale et des nouveaux comportements et tendances de voyage (trends), l’amélioration de l’attractivité par un positionnement fort s’appuyant sur l’identité de chaque île, et le développement d’une culture d’évaluation indispensable au marketing aussi bien de l’ensemble que de chaque pays-membre. Le VIO regroupe les Offices nationaux du tourisme des six îles y compris Mayotte. La première présidence est confiée à Alain Saint-Ange, ministre seychellois du Tourisme et de la culture. Quant à la Direction exécutive, sa mise en place est prévue dès l’obtention d’un financement de l’Union européenne, lequel doit également marquer le lancement d’une campagne promotionnelle concentrée dans un premier temps sur le marché asiatique. Quant aux relations entre la VIO et la COI, cette dernière est notamment prévue intervenir dans le soutien des grandes options stratégiques, pour ne citer que la « toile » aérienne entre les îles. [caption id="attachment_102501" align="aligncenter" width="1257"] L’un des hôtels de luxe de Port-Louis, Maurice.[/caption]

Particularismes

Retour sur l’Histoire. Dans les années 70, naissait l’Alliance touristique de l’océan Indien, ou ATOI. C’était du temps des grandes résolutions et envolées sans lendemain. Il fallut attendre 1984 pour qu’une structure régionale inter-état voie le jour par l’Acte de Victoria signé le 10 janvier par le pays-hôte, Madagascar, et l’île Maurice, jetant les fondations de la Commission de l’océan Indien. Le statut de La Réunion posant problème, l’île française n’adhère à l’ensemble qu’en 1986 avec les Comores. Les pistes d’une coopération pérenne, spécialement en matière de tourisme, prennent du temps à se préciser. Les intérêts particuliers ne peuvent, en effet, pas aisément être effacés sur le terrain. C’est le cas lors de la première Semaine du tourisme des îles de l’océan Indien (SETIL), tenue à Maurice en 2006. La manifestation est boycottée par la puissante Association des hôteliers et restaurateurs mauriciens, et est condamnée à s’achever sur de louables déclarations d’intentions. Même la COI a connu des revers sur la voie d’une destination touristique censée être « combinée », et ce malgré un engagement plus que conséquent de l’Union européenne pour le financement d’un Bureau commun permanent en Europe, des supports informatifs, ainsi que des présences aux Foires et Salons. Les particularismes sont encore vivaces, et le temps de séjour des touristes n’étant pas élastique, on voit mal comment une destination déjà bien cotée sur le marché accepterait de se sacrifier sur l’autel d’intérêts communautaires pouvant se traduire par un nivellement par le bas. [caption id="attachment_102502" align="aligncenter" width="1119"] Des vols charters pour touristes atterrissent directement
à l’aéroport Fascène de Nosy Be.[/caption] À la bouderie des opérateurs mauriciens lors de ce premier SETIL de toutes les illusions s’oppose l’enthousiasme d’une partie malgache, pour qui toutes les occasions sont à prendre, pour tant soit peu rattrapé le temps perdu… Cette même année, Air Mauritius est sacrée meilleure compagnie aérienne de l’océan Indien au World Travel Market de Londres. « Les temps changent, et la conjoncture économique ne permet plus à Maurice de bloquer son accès aérien. La compagnie aérienne mauricienne doit adopter des attitudes nouvelles pour s’en sortir gagnant ». C’est fait avant même d’être dit ! Sur l’axe Paris-Maurice où tous les transporteurs sont à vocation touristique, Air Mauritius réaffirme sa stature de grande compagnie avec, notamment, la flexibilité de ses vols quotidiens, et un confort à bord accru grâce à une configuration de siège moins densifiée. Le nombre des passagers ayant une autre destination dans la zone mais qui préfèrent transiter par Maurice se trouve multiplié par cinq. Mais qu’on se rassure, l’honneur est sauf en cette année 2006 : Air Madagascar a toujours refusé de ne plus être qu’une compagnie d’éclatement entre les îles. Mieux, elle inscrit son nom sur la liste des compagnies ayant le meilleur taux de ponctualité sur la plateforme de Roissy-Charles de Gaulle. À d’autres le sobriquet d’Air Peut-être…
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