Editorial - Vingt cu


Une année tout en symbole. 2020 pourrait être un tournant dans l’histoire. On va célébrer le soixantième anniversaire du retour de l’indépendance. On inaugurera le palais de la Reine réhabilité et rajeuni de plusieurs siècles avec l’intégration de nouvelles technologies. On récupérera aussi peut-être, touchons du bois, les îles malgaches du canal de Mozambique squattées par la France depuis la colonisation. Autant de symboles de la souveraineté nationale que l’État essaie de redonner toute leur valeur et leur sens. Ils donneront un aspect particulier à la fête nationale, cette année. Du moins si tout se réalise. Madagascar sera alors redevenu Madagascar même si la quête d’unevéritable indépendance socio-économique reste une autre paire d’une manche. Le président de la République Andry Rajoelina en a fait un pari de gagner tous ces défis. C’est tout à son honneur. La question est de savoir si la population tient encore à ces symboles. Les générations 2000 semblent loin de l’indépendance, de l’importance des patrimoines culturels comme Manjakamiadana et encore moins de la nécessité de récupérer les îles malgaches occupées par la France. Quand on regarde la faible participation aux élections, on ne peut pas réduire cette démission au ras-le-bol de la population pour la classe politique, il s’agit également d’un manque cruel de civisme et de patriotisme des jeunes générations. La classe électorale a complètement changé depuis les années 2000. Avec une population composée de 65 % de jeunes de moins de 25 ans, on a un électorat qui n’a jamais connu la crise de 1972, l’assassinat du colonel Ratsimandrava, la révolution socialiste de Ratsiraka... Leur univers politique a commencé avec la crise de 2002 suivie de celle de 2009. Deux crises entre deux politiciens malgaches qui affirment être des patriotes fervents. On a perdu presque une décennie à chercher, en vain, des solutions, on s’est enlisé davantage dans la pauvreté. Pour l’autre moitié de la population, les préoccupations sont ailleurs. Ironie du sort, l’année commence par une trombe d’eau dans plusieurs régions du pays alors que les robinets étaient asséchés toute l’année passée. On ne peut rien contre le cynisme de la nature en dépit des meilleurs vœux qu’on s’envoie en ce début d’année. L’eau sera d’ailleurs avec l’énergie, de nouveau, le calvaire de la population cette année. Les problèmes sociaux, la lutte pour la survie occupent une telle place dans le quotidien des gens qu’ils ne peuvent plus avoir la tête ailleurs. Bien évidemment, comme à Noël, tout le monde aime faire la fête même si cela n’offre qu’une illusion. Il faudra ainsi beaucoup de volonté et de courage pour parvenir à remporter ces challenges et surtout persuader la population de faire bloc et de ne pas s’avouer vingt cu en ce début des années 20.
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