Face-à-face - Le gouvernement bousculé par les députés


Ambiance électrique au Centre de conférence internationale d’Ivato. La dernière journée du face-à-face entre l’Assemblée nationale et le gouvernement a été musclée. Un pugilat verbal. Certaines interventions au Centre de conférence internationale (CCI), Ivato, hier, ont affolé les décibels. Fait rare à l’Assemblée nationale, les députés ont bousculé le gouvernement, durant une séance de questions et de réponses. Les échanges ont été musclés. C’est le député Naivo Raholdina, élu du cinquième arrondissement d’Antana­narivo, qui a été le premier à dégainer l’artillerie verbale. Il était, visiblement, décidé à régler ses comptes, en face, avec Johnny Richard Andria­ma­hefarivo, ministre de la Justice sur son sujet de prédilection, les conflits fonciers. L’élu du cinquième arrondissement de la capitale a tiré à boulet rouge contre la justice et les magistrats, notamment, sur le dossier du terrain d’Antanandrano. Le garde des sceaux n’a pas, non plus, été tendre dans sa réplique. Démarrant avec une note d’iro­nie sur le titre « honorable », du député Raholdina, le ministre Andriamahefarivo a dénoncé ses « multiples interventions », dans des affaires foncières en justice, en cours. Le ministre de la Justice est même allé jusqu’à révéler que certains de ceux qui se disent propriétaires du terrain d’Antanandrano, « et que vous défendez monsieur le député », auraient usé de malversations. Vint, ensuite, le tour de parole de la députée Hanitra Razafi­manantsoa, élue du premier arrondissement d’Antana­na­rivo. La figure de l’opposition a, notamment, décoché des flèches contre le général Ravalo­manana, secrétaire d’État à la gendarmerie nationale et Richard Randria­mandrato, ministre de l’Économie et des finances. Le député Fidèle Razara Pierre, autre visage de l’opposition, lui a succédé dans la prise de parole. Là aussi, le grand argentier de l’État a été sa cible privilégiée. Pareillement, du côté du député Roland Ratsiraka, élu indépendant à Toamasina. Il lui a même reproché de tripoter son téléphone, alors qu’il s’adresse à lui. Sortir de ses gonds Le député Razara Pierre s’est, aussi, appliqué à décocher une salve contre Michelle Bavy Angelica, ministre de la Population, de la protection sociale et de la promotion de la femme, concernant la lutte contre le kere. Le grand argentier de l’État a répliqué aux assauts avec quelques amabilités. Au passage, il a rendu la politesse au député de Toamasina, qui manipulait son téléphone durant sa prise de parole. « Il faut bien nous familiariser avec la technologie, comme pour prendre des notes », lance-t-il. La ministre de la Popu­lation a été frontale dans sa réponse à l’élu d’Ambaton­dra­zaka. Avec le franc parler qu’on lui connait, le général Ravalomanana a, également, été cash dans ses répliques aux coups des élus. L’inter­vention de la ministre Lala­tiana Rakotondrazaka Andria-tongarivo, porte parole du gouvernement, peu avant lui, a été également, une réplique acerbe aux attaques en règle des élus d’opposition et de celui de Toamasina. Rongeant son frein durant près de deux heures, le député Raholdina a explosé après la prise de parole des ministres. Il a réclamé le droit de répliquer au garde des sceaux. Il est allé jusqu’à soulevé l’idée « d’une motion de censure partielle ». Un précepte qui n’est pas prévu par la loi. La députée Razafimanantsoa a renchéri en fulminant, « respectez notre institution. C’est à nous les députés d’évaluer vos réalisation, mais ce n’est pas à vous de faire notre procès ». L’élue du premier arrondissement d’Antananarivo est même allée jusqu’à évoquer l’opportunité d’une séance à huis clos. Une manière de dire que la situation pourrait virer à une demande de motion de censure contre le gouvernement. Parlant de « wera wera », elle a, par ailleurs, critiqué l’ordre des priorités dans la politique étatique. Même ton chez le député indépendant Narson Rafidimanana qui souligne que « ce qui est beau n’est pas toujours ce qui est mieux pour la population ». Prenant sur lui durant les deux jours de séance, Christian Ntsay, Premier ministre, est sorti de ses gonds, hier. Concluant les débats, il a réclamé la réciprocité de la part des députés. « La démocratie implique aussi, savoir écouter. Nous vous avons écouté durant toute la séance. Certains de vos propos ont pu être blessants, mais nous avons écouté sans rien dire. Maintenant, c’est notre tour de parler. Alors, je vous demande de bien vouloir nous écouter », fustige Christian Ntsay. À l’affirmation de l’opposition selon lequel est serait « effacé », par rapport au chef de l’État, le Premier ministre réplique, « ce n’est pas vous qui allez me pousser à l’insubordination contre le président de la République ». Le chef du gouvernement s’est, par ailleurs, employé à défendre la politique. « Ce n’est nullement du wera wera. Oseriez-vous dire en face à vos électeurs que toutes ces infrastructures ne servent à rien ? Pourquoi, nous Malgaches, n’avions pas aussi le droit de jouir de belle chose, aux normes ?»
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