Lutte contre la corruption - Les députés réduisent le pouvoir du PAC


Une proposition de loi modifiant le texte instituant le Pôle anti-corruption vient d’être adoptée à l’Assemblée nationale. Elle retire les infractions économiques et financières de la compétence de cette juridiction, entre autres. Une amputation majeure. Les députés ont fait quelques heures supplémentaires. Les débats d’hier, ont été clos vers 22 heures 30 minutes. A l’affiche de cette séance tardive, une proposition de loi modifiant le texte sur le Pôle anti-corruption. Portée par le député Idealson, élu à Ampanihy, une des innovations majeures de cette proposition de loi est « l’exclusion des infractions économiques et financières de la compétence du PAC quelles que soient leur gravité ou leur complexité ». L’initiative du président de la Commission juridique de la Chambre basse a été adoptée avec amendement sur la forme, par la majorité de ses pairs. Le député Idealson explique son initiative en déclarant, « la situation actuelle équivaut à une centralisation de la Justice. Pour l’instant le PAC ne se trouve qu’à Antananarivo, alors que les infractions financières il y en a partout, même dans les plus petites localités. Les quelques magistrats du PAC ne pourront jamais s’occuper de toutes les infractions dans tout Madagascar ». Au motif de « décentraliser la justice » donc, la proposition de loi de l’élu d’Ampanihy confine la compétence du PAC « aux infractions de corruption et assimilés, et de blanchiment de capitaux et financement du terrorisme ». Les quelques magistrats du PAC, suffisent donc, amplement pour l’ensemble du pays, s’agissant de ces infractions. Le texte instituant le PAC prévoit, par ailleurs, qu’au final il y en a un pour chaque province. Un communiqué de presse du gouvernement publié, hier, souligne, justement, que « la mise en place des PAC est l’une de ses priorités ». Suppression Une source au sein du Système anti-corruption (SAC), explique, cependant, que les cas de corruptions sont difficilement punissables, sauf flagrant délit. « Les infractions financières et la corruption sont, pourtant, des infractions connexes, voir indissociables », indique la source. Magistrat de carrière, le député Idéalson plaide qu’une infraction doit être déterminée par la loi et non pas « être basée sur des généralisations ». Il ajoute, « nous ne pouvons pas dire que toute infraction touchant à l’argent couve une corruption ». La raison d’être du PAC est de renforcer la répression de la corruption et des délits connexes. Une autre retouche voulue par la proposition de loi est « la suppression de la confiscation avant condamnation ». La possibilité de confisquer avant condamnation des biens mal acquis est, pourtant, l’une des grandes innovations apportées par la loi sur le PAC. Il est mis en avant comme une arme de dissuasion face aux délinquants financiers. Ayant eu vent de cette initiative de loi, la société civile s’est insurgée en scandant « la lutte contre la corruption menacée ? ». Une erreur de terminologie de la société civile a amené une réponse du gouvernement, soulignant que l’initiative ne vient pas de lui. Une certaine similitude s’entend, du reste, entre la réplique du gouvernement et la réaction du député Idealson à la sortie de la société civile. « Une proposition de loi est une prérogative accordée par la Constitution au député. Aucune loi n’est intangible. Elle vit et évolue suivant le temps, la société et la réalité de la population », défend-il. L’Assemblée nationale a accordé à l’élu d’Ampanihy la faveur d’inscrire sur le vif sa proposition de loi à l’ordre du jour. Discuté en commission, hier, le texte a été adopté juste avant que la session ne soit clôturée, ce jour. Pour faire passer la pilule, probablement, la proposition de loi qui sera transmise au Sénat a été remaniée, « les actes qualifiés d’infractions de corruption et assimilées, de blanchiment de capitaux et financement du terrorisme qui ne sont pas liés aux fonctions des personnes mises en cause devant d’autres juridictions spécialisées relèvent de la compétence du PAC ». L’élu d’Ampanihy présente cette disposition comme une possibilité de poursuivre devant le PAC, les personnalités justiciables devant la Haute cour de justice (HCJ). Il soutient que « c’est une lecture par opposition à l’article sur la HCJ prévue par la Consti­tution ». Il faudra d’abord que la Haute cour constitutionnelle (HCC) examine la constitutionnalité de cette retouche.
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