Banqueroute


Un milliard de dollar. C’est le déficit opérationnel engrangé par la Jirama depuis 2009 selon la Banque mondiale. Certes, c‘est loin d’être un scoop, c’est un montant tellement pharaonique pour choquer l’institution de Bretton Woods. Une somme nettement supérieure aux subventions accordées par les bailleurs de fonds sur une période de quatre à cinq ans. On ne nous a jamais accordé une telle somme étant donné que notre capacité d’absorption ne peut pas ingurgiter un tel montant alors que notre capacité de remboursement est limité. Autrement dit, on ne peut pas vivre au dessus de ses moyens. Eh bien non. On s’est trompé sur toute la ligne. On n’a jamais tenu compte de notre capacité de détournement et notre faculté d’adaptation. La Jirama a réussi là où l’Etat a échoué. Trouver de quoi employer cette somme colossale avec laquelle on aurait pu coinstruire plusieurs barrages hydroélectriques et en finir avec le délestage et tous les problèmes d’eau et d’électricité. Tout compte fait, c’est moins le tarif que la mauvaise gestion et le vol qui a mis la Jirama dans cette situation catastrophique voire désespérée. En 2008, les comptes de la Jirama étaient encore créditeurs de plusieurs millions de dollars. A l’époque l’Etat avait refusé la privatisation de la Jirama et d’Air Madagascar malgré l’exigence des bailleurs de fonds. La gabegie a commencé en 2009. Plusieurs contrats de complaisance de fourniture d’électricité ou de fuel ont été signés avec certaines sociétés entre 2009 et 2017. La Jirama avait acheté du fuel plus cher que le prix officiel . Tout le monde trouvait cela normal. Pendant presque une décennie, la Jirama a été ponctionnée jusqu’à la dernière goutte. Et on en arrive à cette situation où la Jirama n’est plus qu’un pauvre client qui ne peut plus régler ses fournisseurs. C’est l’Etat qui vient à la rescousse à tous les coups pour éviter un black-out total. Les auteurs de ce crime sont totalement impunis sauf un ancien DG emprisonné depuis l’année dernière. Le seul salut est désormais le tarif Optima pour assainir la situation et sauver la Jirama. Une astuce qui fera payer plus cher les nantis et moins cher les pauvres. Une mesure à risque vu les conditions sociales dans lesquelles la population vit depuis plusieurs années et qui ont été aggravées par la pandémie de Covid-19. Mais la Banque mondiale est intransigeante et inflexible quant à l’obligation de procéder à la révision des tarifs pour remettre sur pied la Jirama. La hausse du prix de l’électricité, comme celui des carburants, entraîne une augmentation en série du prix des biens et des services. On ne sera pas ainsi sorti de l’auberge et on risque comme l’État l’avait craint, une crise sociale grave que des politiciens vont récupérer pour appuyer leurs revendications. Le choix a tout d’un dilemme cornélien. La Jirama ou la population ?
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