Rapport de la banque Mondiale - «La pauvreté résulte de plusieurs paramètres»


Durant la présentation des perspectives économiques de Madagascar, hier au Novotel, des hauts responsables de la Banque mondiale ont donné des réponses aux interrogations sur ses aides financières. Cartes sur table. Les yeux dans les yeux. Idah Z. PswarayiRiddihough,  directrice des opérations de la Banque mondiale pour les Comores, Madagascar, Maurice et le Mozambique, Marie-Chantal Uwanyiligira, représentante de la Banque mondiale à Madagascar, Marc Stocker, économiste principal, Ibrahim El Ghandour, spécialiste en gouvernance, tous deux du bureau de Madagascar, ont mis les choses au clair sur les interventions de cette institution financière, cible des récriminations ces derniers temps. C’était hier au Novotel d’Alarobia au cours de la présentation des perspectives économiques de Madagascar pour cette année, encore marquée par la pauvreté grandissante de la population. Voilà des années que la Banque mondiale octroie des millions de dollars. A contrario, le taux de pauvreté de la population n’a cessé de croître. Comment expliquez-vous ces contradictions. Les projets que vous financez sont-ils en cohérence avec les besoins réels du pays? Idah Z. Pswarayi-Riddihough. Le montant des aides importe peu. La Banque mondiale fait des analyses, effectue des études. Elles sont présentées au gouvernement avec des recommandations et des options. Il appartient aux autorités d’en décider. Il s’agit d’un travail commun sous forme de partenariat. Si nous insistons sur les réformes structurelles, ce n’est pas pour le plaisir de tout changer de fond en comble. Mais dans l’objectif d’obtenir des résultats différents, des impacts tangibles sur le terrain. La pauvreté n’est pas une chose isolée, mais la résultante de nombreux paramètres interdépendants. Aussi nous devrions trouver des solutions et non pas une. Pourquoi les décaissements des fonds de la Banque mondiale interviennent-ils plusieurs mois après la signature officielle de leurs allocations? Le régime, à quelques mois des élections présidentielles, est-il prêt à poursuivre ces réformes ? Marie-Chantal Uwanyligira. Je m’excuse mais ma réponse peut froisser certaines susceptibilités. Cette longue attente a pour origine la lenteur procédurière. Après la signature d’un accord de crédit, il faut passer par vingt sept étapes pour décaisser. Des projets attendent dix à onze mois pour être entamés. Je tiens à préciser que la Banque mondiale n’impose jamais des conditionnalités de mise en vigueur. Pour la seconde partie de la question, il appartient au gouvernement de répondre. Étant une Rwandaise, je peux témoigner que mon pays, cité aujourd’hui comme un exemple de réussite en matière de développement socio-économique, a mis vingt-cinq ans pour boucler les réformes. Qu’il faudra mener à leurs termes pour qu’elles puissent produire des résultats. À titre d’illustration, lors du diagnostic du secteur privé, il a été indiqué que Madagascar possède des atouts pour l’économie digitale. Mais comment démocratiser l’internet avec un faible taux d’accès à l’électricité? D’où la nécessité de réformer le secteur de l' énergie. La Banque mondiale y a consacré beaucoup de temps. Avez-vous les moyens de contrôle des dépenses gouvernementales de vos appuis financiers ? Marie Chantal Uwanyligira. Je pense que nous avons des instruments efficaces et efficients pour mener des audits sur les résultats des projets. Nous avons déjà exigé le remboursement illico des dépenses jugées inéligibles suivant les termes du contrat. La Cour des comptes a aussi publié ses appréciations sur nos contributions. Sur cet aspect là, nous avons ce qu’il faut pour scruter les affectations de nos aides financières. Indépendamment des outils gouvernementaux. À propos des subventions de la Jirama, quelle est la position de la Banque mondiale ? Idah Z. PsawaraviRiddihough. J’ai eu déjà l’occasion d’en parler. Je ne reviendrai plus sur mon exposé. Mais comment voulez-vous réduire le taux de pauvreté de la population avec un taux d’accès à l’électricité de 15%? Alors que les autres pays pairs, en moyenne, arrivent à 47%. Ces subventions ont aussi des effets secondaires sur les finances publiques. Le système de tarification Optima vise à permettre à la Jirama d’atteindre l’équilibre financier opérationnel. Auparavant les plus riches payaient moins que les plus pauvres. D’où le concept d’optimisation. Encore une fois, nous suggérons des options. Aux autorités de faire ou de ne pas faire le nécessaire. Il faudra une coalition pour la croissance afin de lutter contre cette pauvreté. Il est important de s’approprier des réformes avancées.
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