David était Goliath


Le séjour du président de la Banque Mondiale, David Malpass s’est très bien passé. Il est venu, il a vu, il a vaincu. Les rôles étaient cette fois inversés. Le géant David, pas moins de deux mètres sous la toise était en fait le Goliath qui se faisait respecter et imposait sa loi à ses interlocuteurs. Il n’était pas venu pour faire de la villégiature une semaine seulement après sa nomination à la tête de la plus grande banque du monde. Son déplacement devait avoir un caractère éminemment urgent dans l’un des pays les plus pauvres au monde même s’il est le troisième président de cette institution financière à visiter Madagascar. Les deux premiers étaient venus dans un contexte plus favorable. David n’était pas venu à Canossa. Au contraire, il était venu pour imposer sa loi, remonter les bretelles aux uns, rappeler les dix commandements aux autres. Andry Rajoelina a dû ainsi ravaler son antipathie aux bailleurs de fonds traditionnels et positiver sa soumission. Les bailleurs de fonds sont convaincus de l’IEM et le monde entier nous voit avec un autre regard. Il y a à peine six mois pendant la campagne électorale de la présidentielle, Andry Rajoelina avait déclaré lors d’un entretien télévisé, que si on continue à travailler avec les bailleurs de fonds traditionnels, on restera au même niveau en 2060. Il a confirmé sa conviction lors des débats télévisés entre les deux candidats du second tour de la présidentielle. Des déclarations à la limite de la correctionnelle pour Bretton Woods qui a pris l’affaire avec la plus haute importance. Andry Rajoelina n’a pourtant pas tort. En presque un demi-siècle de collaboration avec les bailleurs de fonds traditionnels, on est arrivé avec cette situation dramatique qui classe Madagascar parmi les cinq pays les plus pauvres au monde. Et rien que pendant l’administration Rajaonarimampianina, les subsides de la Banque Mondiale ont atteint presque un demi-milliard de dollars en quatre ans sans que cela ait pu faire reculer la pauvreté. Il faut dire que l’efficacité et les résultats se jaugent au montant du décaissement du côté des bailleurs de fonds et non sur l’impact des fonds alloués sur les conditions de vie de la population. Ce sera encore le cas avec les 392 millions de dollars et 100 millions de dollars d’aides budgétaires. Des fonds exceptionnels pour éteindre toute velléité nationaliste de Andry Rajoelina dont certains projets de l’IEM censés être financés par des bailleurs privés sont désormais compromis. La Banque Mondiale soutient les projets de développement mais ne finance pas les caprices pour épater la galerie comme la plage à la Miami ou les projets frou-frou et paillettes comme Tanamasoandro. Voilà donc Rajoelina face à une situation qu’il n’avait pas prévu ou dont il avait estimé en avoir été épargné. La Banque Mondiale lui sauve la face avec ses fonds providentiels pour masquer l’échec de ses cent jours au pouvoir mais elle limite également sa marge de manœuvre pour pouvoir tenir ses promesses. C’est presque à oublier à moins que la Banque Mondiale n’ait plus d’yeux que pour l’IEM qui est sans doute mieux que les thérapies parachutées outre-mer. Mais cette volte-face, qui n’est pas la première, fait perdre à Rajoelina une partie de sa crédibilité et de sa notoriété au niveau national. À l’étranger, sa soumission lui vaut certainement une carte de membre parmi les bons élèves.
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