Ratsimilaho, le rassembleur des Betsimisaraka


Si sur la côte Ouest, les Sakalava dominent, de l’autre côté, sur la côte Est, on rencontre les divisions betsimisaraka. Au départ unis, ils doivent d’abord résister aux Sakalava, puis faire face aux disputes des chefs de la région côtière pour posséder les ports et les sites de commerce où « les Européens, marchands d’esclaves, acheteurs de riz et d’épices tropicales, offraient en échange leur pacotille et leur argent ». Enfin, la rivalité franco-anglaise, dans cette partie de l’océan Indien, enlève aux Betsimisaraka leurs dernières chances d’unité, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Les groupes ethniques du Sud et ceux du Nord entrent en lutte. Les premiers, les Tsitambala, rassemblés par le prince Ramananao, occupent la région du Bas-Mangoky, expliquent les auteurs de l’ Histoire de Madagascar de 1967. Ils progressent de leur capitale, Vatomandry, vers Andevoranto. « Les Betsimisaraka Antavaratra furent contraints d’accepter la servitude et Ramananao contrôla tout le pays de Galemboule (Foulpointe) au moment où les pirates fréquentaient encore l’ile Sainte-Marie et la baie d’Antongil, et perturbaient la vie de la côte. » Puis apparait Ratsimilaho, le rassembleur des Betsimisaraka. Il est le fils d’un pirate anglais « nommé Tam », Thomas White. Ce Zana-Malata semble avoir provoqué une prise de conscience chez les Antavaratra. « Les chefs des clans se réunirent, selon la tradition, pour l’écouter et décider. » C’est ainsi que Ratsimilaho, suivi par les chefs du Nord, conduit les Antavaratra au combat et reprend Fenoarivo en 1712. Vaincu, Ramananao doit reculer jusqu’à Toamasina et « reconnaitre la vassalité de ses Tsitambala que les compagnons du Zana-Malata désignaient désormais par le nom de Betanimena ». Ratsimilaho se lance ensuite dans la conquête de Toamasina et du Sud. Il sait gagner l’amitié des Ambanivolo qui vivent dans les « savoka » de bambous de l’arrière-pays, la région du Bas-Mangoky, et les arracher à la servitude. « L’alliance des Betsimisaraka du Sud, Anatatsimo, dont il épousa une princesse, lui permit après bien des efforts, d’imposer le tribut à Ramananao et de contrôler Toamasina. Il ne devint réellement le roi des Betsimisaraka qu’après la disparition du Filohabe, le Grand chef, des Anatatsimo qui le reconnurent pour leur suzerain. » Ratsimilaho se donne alors le nom de Ramaromanompo. De 1712 à 1750, ses efforts aboutissent au rassemblement des Betsimisaraka du Nord et du Sud, dans le cadre d’un royaume qui s’étend de la baie d’Antongil aux pays du Bas-Mangoky. D’où son nouveau nom qui exprime sa nouvelle puissance et confère à ses descendants le prestige de ses exploits. Mais « il ne parvint pas, avant sa mort, à égaler le roi du Boina, Ramahasarika dont il avait obtenu l’alliance en épousant une de ses filles. » Pourtant, les conditions géographiques de la traite (situation, commerce) peuvent paraitre comparables à celles du Boina : façade maritime ouverte sur les Mascareignes, fréquentée par les commerçants et surtout par les marchands d’esclaves. Toutefois, « l’étalement du royaume en latitude rendait difficile le contrôle des lieux de traite ». De plus, la féodalité betsimisaraka est encore « moins docile » que la féodalité sakalava. Les Filohabe, en effet, n’acceptent la souveraineté que le temps de la guerre. « Ils étaient jaloux de leur liberté. » La forte personnalité de Ramaromanompo lui permet cependant, de les dominer jusqu’à sa mort. Les fusils échangés au cours d’opérations de la traite, assurent cette puissance. « Fils d’un Anglais, ayant séjourné en Angleterre, le roi betsimisaraka développe le commerce et échappe mieux que ses vassaux aux pièges et tromperies des pirates et des négriers. » Quand il meurt vers 1750, la féodalité turbulente des Filohabe l’emporte sur les tendances d’unité. Ses héritiers, Zanahary et Bety sont dépassés. Les Betsimisaraka commencent à être divisés.
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